vendredi 28 janvier 2011

Problème de moteur





On est parfois perplexe au vu de la pertinence du listing offert par les moteurs de recherche à la suite de l’entrée d’une demande qu’on veut précise: celle écrite entre guillemets dans la fenêtre de recherche. Ainsi, si vous tapez dans Google, "Le blog-notes de la Mansarde", vous trouverez parmi quelques liens utiles (il faut en convenir), d’autres qui ont de quoi interloquer.


Un exemple parmi d'autres, un site (123.people pour ne pas le nommer) répertorie et propose les adresses de nombreux personnages de fiction de mes nouvelles. On trouve aussi au sein d’une liste à la Prévert des liens vers des articles de bureaux, des conseils pour restaurer une mansarde (au cas où la mienne prendrait l'eau), un lien vers un site porno ( ?!), un lien vers un site asiatique d’animaux de compagnie (merci de veiller au bien être du rédacteur du blog au cas où il serait seul à mourir), un lien sur la fabrication des rampes d’escalier cherchant probablement à vanter mon style d’humour.


Que dire alors des publicités qu’on me propose, associées lors de la publication de certains billets: formation de mentaliste pour le dernier en date, épilation masculine pour le billet traitant d’un type d’hermaphrodisme (encore heureux que ce ne soit pas les heures des séances du film culte "Ma femme s'appelle Maurice" ou Morris, d'ailleurs), initiation au tarot de Marseille en rapport avec un billet aux vagues consonances politiques, pour ne citer que les plus récentes !


Le lien qui tient cependant le pompon, c’est tout de même celui concernant les coordonnées d’un certain "Simon Cussonet", pseudonyme douteux dont j'avais usé un jour, mutin que je suis, pour répondre au commentaire d’un internaute...


Souhaitant améliorer la pertinence requise à la demande éventuelle de certains internautes au sujet de l’adresse précise du Sieur en question, pour ceux qui tenteraient désespérément de le joindre : Simon Cussonet habite à Tussorel dans le département de l’Eure.


Enfin, pour ceux qui seraient désespérément passés au travers de la fine plaisanterie de salon dont j'avais fait usage, au risque d'être lourdingue, cela donne en langage décodé : Si mon cul sonnait tu saurais l’heure (pour les visiteurs anglo-saxons ne pouvant percevoir toute la saveur bon enfant de ce private joke: "If my ass was ringing, you would know the time it is."). Qu'on se le dise, mais à l'oreille, à voix feutrée...

jeudi 27 janvier 2011

Le bonheur dans l'esclavage



Lors de la publication en livre de poche du roman de 1954 de Dominique Aury, dite Pauline Réage, «Histoire d’O», un texte de Jean Paulhan servait de préface: «Le bonheur dans l’esclavage». Il débutait ainsi :

« Une singulière révolte ensanglanta, dans le courant de l’année mil huit cent trente-huit, l’île paisible de la Barbade. Deux cents Noirs environ, tant hommes que femmes et tous récemment promus à la liberté par les Ordonnances de mars, vinrent un matin prier leur maître, un certain Glenelg, de les reprendre à titre d’esclaves. Lecture fut donnée du cahier de doléances, rédigé par un pasteur anabaptiste, qu’ils portaient avec eux. Puis la discussion s’engagea. Mais Glenelg, soit timidité, scrupules, simple crainte des lois, refusa de se laisser convaincre. Sur quoi il fut d’abord gentiment bousculé, puis massacré avec sa famille par les Noirs qui reprirent le soir même leurs cases, leurs palabres et leurs travaux et rites accoutumés. L’affaire put être vite étouffée par les soins du Gouverneur Mac Gregor, et la Libération suivit son cours. Quant au cahier de doléances, il n’a jamais été retrouvé. Je songe parfois à ce cahier. Il est vraisemblable qu’il contenait, a coté de justes plaintes touchant l’organisation des maisons de travail (workhouse), la substitution de la cellule au fouet, et l’interdiction faite aux «apprentis» - ainsi nommait-on les nouveaux travailleurs libres – de tomber malades, l’esquisse au moins d’une apologie de l’esclavage. La remarque, par exemple, que les seules libertés auxquelles nous soyons sensibles sont celles qui viennent jeter autrui dans une servitude équivalente. Il n’est pas un homme qui se réjouisse de respirer librement. Mais si j’obtiens, par exemple, de jouer gaiement du banjo jusqu’à deux heures du matin, mon voisin perd la liberté de ne pas m’entendre jouer du banjo jusqu’à deux heures du matin. Si je parviens à ne rien faire, mon voisin doit travailler pour deux. Et l’on sait d’ailleurs qu’une passion inconditionnelle pour la liberté dans le monde ne manque pas d’entraîner assez vite des conflits et des guerres, non moins inconditionnelles. Ajoutez que l’esclave étant destiné par les soins de la Dialectique, à devenir maître à son tour, l’on aurait tort sans doute de vouloir précipiter les lois de la nature. Ajoutez enfin qu’il n’est pas sans grandeur, il ne va pas non plus sans joie, de s’abandonner à la volonté d’autrui (comme il arrive aux amoureux et aux mystiques) et se voir enfin ! débarrassé de ses plaisirs, intérêts et complexes personnels. Bref, ce petit cahier ferait aujourd’hui, mieux encore qu’il y a cent vingt ans, figure d’hérésie : livre dangereux. »

Jean Paulhan – 1958 -

Voici un petit texte, qui publié de nos jours, malgré la phrase qui le conclut, aurait défrayé la chronique et fait sortir dans la rue ou rameuter pêle-mêle devant les tribunaux quelques communautaristes obsessionnels au nombre desquels on pourrait compter des féministes (haro sur l’ouvrage de la Pauline), d’actuels disciples de Harlem Désir (on parle d’esclaves noirs qui jouent du banjo jusqu’à point d’heure plutôt que d’opprimés d’origine africaine jouant du luth pour oublier leur misère) et une poignée de sionistes intégristes parce qu’il n’est fait mention nulle part de la Shoah. En poussant le bouchon, aussi quelques fanatiques d’articles relatant en long en large et en travers tout ce qui peut se rapporter aux crimes sexuels, il n’en est nullement question alors que c’est très en vogue de nos jours dans la presse et dans la multitude de séries policières dont on nous abreuve au pro rata probable de la délectation de la population, voire de nos classes dirigeantes, pour ce genre d’affaires. En y réfléchissant, cela ne date pas d’hier et remonte bien avant l’époque de Jack l’éventreur.

A l'évidence, si l’on regarde ce texte avec le petit bout de la lorgnette, il est pour le moins surprenant et particulièrement provocateur. Il prête même à caution en imaginant les conclusions dangereuses que d’aucuns pourraient en tirer et les modes de pression dont ils seraient susceptibles d’user. Cependant, nombre de comportements étranges de mes concitoyens m’amènent parfois à y trouver un début d’explication concernant le goût qui les porte à finalement s’accommoder de leur sort, comme si une angoisse subite les assaillaient à l’idée de ne plus se trouver du jour au lendemain sous la coupe d’une instance dirigeante, d’un chef, d’un supérieur hiérarchique, ou de lois contraignantes, alors qu’ils clament du matin au soir à qui veut l’entendre leur soif de liberté. Qu’on puisse la leur octroyer sans limites bien fixées semble inquiéter en fait la plupart d’entre nous comme si nous avions bien enfoui en dedans de nous un goût prononcé pour l’obéissance qui d’une certaine manière doit rassurer plus encore que l’usage d’une autonomie élargie.

A ce propos, on ne saurait trop recommander le film de Denys Arcand, « L’âge des ténèbres ».

"La liberté ne consiste pas à avoir un bon maître, mais à n’en point avoir. »
Cicéron

"La grande faiblesse des régimes de liberté, c'est que chacun y est libre de clamer qu'on ne l'est pas."
Jean Rostand

"Les Français n'aiment point la liberté ; l'égalité seule est leur idole."
François-René de Chateaubriand

"La liberté n'offre qu'une chance d'être meilleur, la servitude n'est que la certitude de devenir pire."
Albert Camus

"Notre liberté est menacée par le besoin de sécurité et la sécurité elle-même est menacée par le souci obsédant qu'on en a."
Norbert Bensaïd

"Liberté implique responsabilité. C'est là pourquoi la plupart des hommes la redoutent."
- George Bernard -


vendredi 21 janvier 2011

C’est la faute à Voltaire



Aimer tout le monde. Dieu m’en garde ! Il faudrait que j’eusse le goût exquis d’aduler dans le tas quelques monstres sanguinaires.

Désirer me faire aimer de tous. Mon psychiatre m’en garde ! Cela reviendrait à brûler une belle énergie pour séduire qui je déteste, au risque d’en manquer auprès de ceux que j’aime ou apprécie.

Aimer le monde tel qu’il est. Vertudieu ! Autant décider que l’Histoire s’est brusquement arrêtée hier au soir. Elle regorge de sagas épouvantables, de récits de massacres de toute nature et de crimes en tout genre, contre des individus, contre l’humanité, contre la planète même. Autant de séquelles longues à s’estomper dans la mémoire collective qui est tenace et peu oublieuse. Se bercer de l’illusion funeste que la civilisation moderne aurait du jour au lendemain définitivement désactivé les mécanismes à la base des errements mortifères du passé, imaginer qu’une mutation génétique soudaine et favorable chez Homo sapiens sapiens (on aurait tout de même pu trouver un terme moins redondant) saurait enrayer ces grands processus de destruction, alors que les historiens écrivent sans cesse des livres déclinant des annales de massacres suintant le plagiat, procéderait d’un aveuglement consternant. Pour couper court au débat, il suffit d’allumer sa radio au moment des informations.

Je me méfie comme de la peste des donneurs de leçons, des apôtres de la morale, des anciennes mères maquerelles devenues sur le tard, la plupart du temps par nécessité, présidentes de ligues de vertus. A la suite d’un quelconque tour de passe-passe mental, ces individus seraient-ils donc parvenus au déni complet de leur coté obscur ou chercheraient-ils à nous faire oublier que le jeu des masques est la grande occupation de l’espèce humaine ? Quand, un temps oisif, j’écoute le prêchi-prêcha des «beaux esprits médiatiques», je ne peux m’empêcher de lire entre leurs lignes et de débusquer çà et là au sein de leurs grands discours quelques taches ayant résisté au blanchiment de l’aube qu’ils ont revêtue et dans laquelle ils se pavanent.

Le seul combat qui pourrait mener au meilleur des mondes ne pouvant se jouer avec efficacité qu’à l’échelle de chaque individu, je vois mal comment, sinon par miracle, une société entière pourrait entreprendre avec succès cette révolution salutaire menant à la « sainteté collective », et moins encore, comment elle parviendrait à léguer sans coup férir aux générations suivantes les fruits de ses travaux rédempteurs. Chaque génération commet et commettra les erreurs des précédentes puisque c’est en somme toujours la même initiation qu’elle doit ou devra subir, avec son lot de rares succès et d’échecs cuisants.

Certes, la connaissance et la culture qui s’amoncellent depuis des siècles pourraient aider à ne pas tomber systématiquement dans les mêmes ornières. Cependant, le niveau sous marin abyssal d’inculture recommandé de nos jours, l’insignifiance portée aux nues comme valeur étalon, ne me laissent présager rien de bon, et, parfois, je me prends à jouer les Cassandre ou les prophètes de l’Apocalypse affalé dans un canapé devant mon téléviseur, éberlué par le spectacle de tous ces Candide voltairien buvant comme un hydromel délectable les paroles d’un quelconque Pangloss s’érigeant en nouveau prédicateur des temps modernes.

Alors, gardez-vous d’apporter le moindre crédit à mon prêche de scrogneugneu en proie au tracassin, agacé par un prurit inopiné l’amenant à pondre ce court pamphlet calamiteux. Il est digne d’un réactionnaire intégriste qu’on souhaiterait catatonique plutôt qu’incontinent. De préférence, allez faire un tour dans votre jardin, pas pour vous soulager dans la cabane au fond, mais pour décider de le cultiver un chouïa…

«Pangloss disait quelquefois à Candide : “Tous les événements sont enchaînés dans le meilleur des mondes possibles ; car enfin si vous n’aviez pas été chassé d’un beau château à grands coups de pied dans le derrière pour l’amour de mademoiselle Cunégonde, si vous n’aviez pas été mis à l’Inquisition, si vous n’aviez pas couru l’Amérique à pied, si vous n’aviez pas donné un bon coup d’épée au baron, si vous n’aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d’Eldorado, vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches.
– Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin.”»

jeudi 20 janvier 2011

Un type de pseudohermaphrodisme masculin : le syndrome d’insensibilité aux androgènes (AIS)

Tableau schématique du caryotype humain - Wikipédia -



Ce billet ne tient à proposer que la description succincte d’un type d’anomalies de la différenciation sexuelle pour illustrer le fait qu’il est n’est pas anodin et parfois difficile de fixer à la naissance le sexe du nouveau-né devant figurer sur son état civil.

Il existe en effet trois niveaux différents pour définir le sexe d'un individu :

- le sexe génétique, associé chez l'homme à la présence du chromosome Y et chez la femme à son absence. A noter, parfois et rarement, la présence de contingents cellulaires possédant des caryotypes (voir l'image du billet) différents: on parle alors de "mosaïques".

- le sexe gonadique qui correspond à l'orientation de la gonade en testis, chez XY, ou ovaires, chez XX.

- le sexe phénotypique lié à l'aspect masculin ou féminin des organes génitaux externes.

Il faudrait d’ailleurs ajouter :

- le sexe psychoaffectif : l’orientation en direction d’un choix d’objet hétérosexuel, homosexuel ou bisexuel (souvent un état transitoire avant une orientation définitive). Le transsexualisme à vocation féminine ou masculine chez des sujets ayant la conviction d’appartenir au sexe qui n’est pas le leur et pouvant aller jusqu’à la volonté d’avoir recours à la chirurgie ou à des traitements hormonaux pour parvenir à accorder leur phénotype avec leur sexe psychoaffectif.


La différenciation sexuelle correspond à une cascade d'évènements. Le sexe génétique détermine le type de développement des gonades qui, à leur tour, vont, selon leurs sécrétions hormonales, assurer la différenciation des organes génitaux internes et externes dans le sexe masculin ou féminin.

Il existe des anomalies de cette différenciation. Dans un souci de clarté, on peut utiliser cette classification qui a le mérite d’être simple :

- insuffisance de virilisation chez XY, pseudohermaphrodisme masculin
- insuffisance de féminisation chez XX, pseudohermaphrodisme féminin
- exceptionnelle présence d'ovotestis, hermaphrodisme vrai


Un type de pseudohermaphrodisme masculin


Le syndrome du testicule féminisant de Goldberg (en anglais testicular feminization syndrome, Morris' syndrome), appelé également syndrome de féminisation testiculaire, syndrome du testicule non virilisant, syndrome de Morris, syndrome d’insensibilité partielle ou complète aux androgènes (AIS) – terme le plus fréquemment utilisé de nos jours - est une affection qui correspond à une variété de pseudohermaphrodisme masculin (ou androgynoïde) au cours duquel les testicules sont situés dans les grandes lèvres, le canal inguinal ou l'abdomen. « Le » patient présente un aspect féminin, son appareil génital externe est proche de celui de la femme et son comportement psychoaffectif est féminin, dans la plupart des cas. L'appareil génital interne se caractérise par l'absence d'utérus, d'ovaires, de trompes, ce qui explique l'aménorrhée primaire (absence des premières règles après la fourchette d’âge attendue) et la stérilité dont souffrent ces individus.

La transmission de ce syndrome est maternelle sur le mode récessif. La présence d'un «pseudo-vagin» hypoplasique (peu développé) et court est l'une des caractéristiques de ce syndrome.
En cas d'absence totale de récepteurs des androgènes, la différenciation sexuelle phénotypique est une différenciation féminine.

Incidence : évaluée à 1 pour 20 000 naissances, mais les chiffres varient beaucoup.

Physiopathologie et découverte clinique: anomalies de fonctionnement des récepteurs cellulaires aux androgènes (hormones mâles) se traduisant par une grande variété d'expressions cliniques allant de «l'ambiguïté» sexuelle patente à la naissance à une azoospermie (absence de spermatozoïdes dans le sperme) découverte lors de l'exploration d'un couple infertile.

Traitements proposés après consentement éclairé du patient:

- Gonadectomie prophylactique (les médecins conseillent aux parents l’ablation des testicules afin d'éviter une cancérisation plus fréquente liée en particulier à l’ectopie).
- Hormones: œstrogènes.
- Vaginoplastie ou chirurgie vaginale cosmétique - pour créer un vagin de longueur typique.

Pour en connaître un peu plus:

- Groupe de soutien à l’AIS

- Brochure en ligne


***
Note: un syndrome proche dans son expression clinique, le déficit en 5-alpha réductase, un temps assimilé à ce dernier, est désormais individualisé.

Le déficit en 5-alpha réductase est une pathologie, également très rare, entraînant aussi chez les patients un pseudohermaphrodisme masculin, défini par une différenciation incomplète des organes génitaux chez un patient de caryotype XY. Cette enzyme catalyse la conversion de testostérone (T) en dihydrotestostérone (DHT), hormone indispensable à la différenciation masculine des organes génitaux externes et au développement du tractus uro-génital masculin. Le tableau classique (hypospadias périnéoscrotal pseudovaginal) est caractérisé par une ambiguïté sexuelle à la naissance, associant bourgeon génital, hypospadias, scrotum bifide et sinus uro-génital avec présence d'une cavité postérieure (reliquat vaginal). Cependant, l'aspect des organes génitaux externes s'étend selon les patients d'un phénotype féminin à un aspect masculin avec hypospadias et/ou micropénis. Les testicules sont palpés dans les grandes lèvres ou dans les canaux inguinaux. Le tractus urogénital interne est bien développé, et les canaux Mülleriens ont régressé normalement. A la puberté, en l'absence de gonadectomie, des signes de virilisation se développent, sans gynécomastie, du fait de l'action périphérique de la testostérone. La majorité des patients est infertile. La transmission de cette maladie est de type autosomique récessif. La 5-alpha-réductase est codée par le gène SRD5A2. Plus de 40 mutations du gène SRD5A2 ont été rapportées, situées dans l'ensemble des 5 exons de ce gène localisé en 2p23. Il s'agit en majorité de substitutions d'acides aminés, mais également de grandes ou petites délétions, de mutations non-sens ou de mutations dans un site d'épissage. Les tests hormonaux retrouvent un taux de testostérone normal ou augmenté associé à un taux bas de DHT, conduisant à une élévation du rapport T/DHT (>20), de base et après stimulation par l'hCG (human chorionic gonadotropin). La conversion de testostérone en DHT peut être étudiée sur culture de fibroblastes de peau génitale, mais l'existence de faux négatifs n'est pas rare. La décision concernant le choix du sexe dans lequel sera élevé l'enfant reste controversée, et doit être discutée au cas par cas, en fonction des résultats escomptés de la génitoplastie masculinisante.

*Auteur : Orphanet (février 2005)*


vendredi 14 janvier 2011

Francesco Alberoni : Le choc amoureux


«Personne ne tombe amoureux s’il est, même partiellement, satisfait de ce qu’il a et de ce qu’il est. L’amour naît d’une surcharge dépressive qui se caractérise par l’impossibilité de trouver dans l’existence quotidienne quelque chose qui vaille la peine. »

Francesco Alberoni.

« Chacun des vingt-deux chapitres de ce Sherlock Holmes du cœur est un petit chef-d’œuvre (...) Il ne sera désormais plus possible de tomber dans un mouvement collectif à deux sans son Alberoni sous le bras »

Anne Pons, « Le Monde ».

«Innamoramento e amore», l’ouvrage du sociologue de Milan, Francesco Alberoni, débute ainsi :

«Qu’est-ce que tomber amoureux ? C’est l’état naissant d’un mouvement collectif à deux. Cette définition pourrait conclure une longue analyse de faits et d’interprétations.

J’ai préféré la placer en introduction pour qu’elle nous guide dans ce court voyage à travers un territoire que nous connaissons tous, car tous nous avons directement vécu l’expérience de l’amour, qui reste pourtant énigmatique et insaisissable. Cette définition pose le problème de tomber amoureux d’une façon nouvelle et le situe dans une optique différente de celle à laquelle nous ont habitué la psychologie, la sociologie et même l’art.

Tomber amoureux n’est ni un phénomène quotidien, ni une sublimation de la sexualité, ni un caprice de l’imagination. Ce n’est pas non plus un phénomène "sui generis", ineffable, divin ou diabolique. Ce phénomène peut cependant se classer dans une catégorie déjà connue, celle des mouvements collectifs. Mais il s’en distingue par une originalité particulière et spécifique : on ne peut le confondre, par exemple, avec des mouvements comme la Réforme protestante, ou le mouvement étudiant, le mouvement féministe, le mouvement de David Lazzaretti ou le mouvement islamique de Khomeiny. La confusion est absolument impossible. Si tomber amoureux appartient à la même famille d’événements, il en constitue, pourtant, un cas spécial. Entre les grands mouvements collectifs de l’histoire et le fait de tomber amoureux, il y a cependant une parenté très proche : la nature des forces qui se libèrent et qui agissent sont du même type ; de nombreuses expériences, la solidarité, la joie de vivre, le renouveau, sont analogues. Mais il existe une différence fondamentale entre eux : les grands mouvements collectifs impliquent un très grand nombre de personnes et restent ouverts à d’autres individus. Tomber amoureux, au contraire, tout en étant un mouvement collectif, ne concerne que deux personnes seulement ; quelle qu’en soit la valeur universelle qui puisse s’en dégager, son horizon d’appartenance est strictement lié au fait d’être complet, achevé, avec deux personnes et deux seulement. C’est sa spécificité, sa singularité, ce qui lui confère certains caractères uniques.

De nombreux sociologues ont analysé les mouvements collectifs, ils nous ont décrit les expériences qui s’y produisent. Durkheim, par exemple, traitant des états d’effervescence collective, dit : 

« L’homme qui les éprouve a l’impression qu’il est dominé par des forces qu’il ne reconnaît pas comme siennes, qui le mènent, dont il n’est pas maître (…) il se sent comme transporté dans un monde différent de celui où s’écoule son existence privée. La vie n’y est pas seulement intense, elle est qualitativement différente (…) L’individu se désintéresse de lui-même, s’oublie, se donne tout entier aux fins communes (…) (Ces forces) éprouvent le besoin de se répandre pour se répandre, par jeu, sans but (…) A ces moments, il est vrai, cette vie plus haute est vécue avec une telle intensité et d’une manière tellement exclusive qu’elle tient presque toute la place dans les consciences, qu’elle en chasse plus ou moins complètement les préoccupations égoïstes et vulgaires. »

Quand Durkheim écrivait ces lignes, il ne pensait pas du tout à l’amour naissant mais songeait à la Révolution française et à d’autres événements révolutionnaires de vaste portée. En effet, les émotions qu’il décrit sont très courantes. Elles se retrouvent au sein de ces grands processus historiques tels que la Révolution française, le développement du christianisme ou celui de l’islam, mais également dans d’autres mouvements de moindre importance.

Tous les mouvements collectifs dans leur phase initiale, celles que nous définirons comme l’état naissant, possèdent ces mêmes caractéristiques. Il est curieux que l’analyse de Durkheim puisse s’appliquer également à la passion amoureuse. Max Weber nous donne un deuxième exemple dans son étude des phénomènes au cours desquels la créativité, l’enthousiasme et la foi se manifestent pleinement. Mais il les considère comme un aspect du pouvoir, c'est-à-dire comme quelque chose qui dépend d’un chef charismatique. Ce chef charismatique se signale par sa rupture avec la tradition; il entraîne ses disciples dans une aventure héroïque et suscite chez ceux qui le suivent l’expérience d’un renouveau intérieur, d’une "métanoïa" au sens où l’entend Saint Paul. Sous l’impulsion d’un chef charismatique, les soucis économiques cèdent place à un libre épanouissement de la foi et de l’idéal, à une vie d’enthousiasme et de passion. Toutes ces réactions, Weber les attribue au chef, à ses qualités de chef. En réalité, il commet l’erreur que fait chacun de nous lorsqu’il tombe amoureux : celle d’imputer l’expérience extraordinaire qu’il est en train de vivre aux qualités de l’être aimé. L’être aimé, en revanche, n’est pas différent des autres. C’est la nature des relations entre nous et celui que nous aimons, la nature de l’expérience extraordinaire que nous vivons, qui rendent différente et extraordinaire la personne aimée et, plus profondément, qui nous rendent tous deux différents et extraordinaires.»

Le livre se lit d’une traite et les derniers chapitres ouvrent un angle de lecture inattendu sur ce phénomène qui a inspiré tant d’auteurs occidentaux depuis l’aube de la civilisation.

samedi 8 janvier 2011

Quand Harry rencontre Sally






La comédie américaine continue à souffrir, aujourd’hui, d’un a priori négatif : un cinéma de pur divertissement, superficiel, sans prise sur le monde réel et ses enjeux, politiques et sociaux. Certes, des films comme Mary à tout prix, des frères Farrelly, ou Serial Noceurs, de David Dobkin, malgré quelques qualités évidentes, relèvent d’un humour potache, adolescent, délibérément peu soucieux du monde. Pourtant, dans l’histoire du cinéma hollywoodien, la comédie a souvent été, au contraire, le genre le plus audacieux quant au discours sur les mœurs et sur la réalité sociale et politique des États-Unis. De nombreux auteurs ont su profiter de la surface légère et consensuelle de la comédie pour faire passer en contrebande des idées qu’ils n’auraient pu exposer frontalement dans un film «sérieux»: lutte des classes, injustice sociale, homosexualité.

L’histoire de la comédie américaine se découpe en plusieurs périodes. Ce fut d’abord le burlesque, genre majeur du cinéma muet, dominé par les figures de Charlie Chaplin et de Buster Keaton. Dès l’arrivée du parlant, le talent des dialoguistes donna naissance à la screwball comedy (que l’on peut traduire par «comédie de cinglés»), caractérisée par la vitesse débridée des dialogues et une liberté de ton exceptionnelle dans l’histoire des studios. Les principaux auteurs furent Lubitsch, Cukor, Hawks, La Cava, et leurs acteurs fétiches Cary Grant, Gary Cooper, Carole Lombard, Katharine Hepburn.

Le genre déclina après 1945, et la comédie ne connut jamais plus pareil âge d’or. Parmi les maîtres de la screwball comedy, seuls Hawks (Monkey Business, 1952) et Cukor (Madame porte la culotte, 1949) prolongèrent la tradition. Sauf exceptions, la comédie américaine a perdu son insouciance, sa vitesse, son impertinence, est devenue plus sentimentale, douce-amère. Seul Billy Wilder parvient à imposer un ton singulier, sombre et acerbe, dans des films comme The Apartment ou Stalag 17. Dans les années soixante, une nouvelle génération d’auteurs renouvelle le genre, en opérant un retour au burlesque : Blake Edwards, Frank Tashlin, Jerry Lewis. L’efficacité comique de leurs films ne doit pas tant au dialogue brillant de la screwball comedy qu’à un burlesque des corps et des situations, comme dans le chef d’œuvre The Party (Blake Edwards, 1968).

Par Cyril Neyrat


Quand Harry rencontre Sally (When Harry Met Sally) est un film américain de Rob Reiner sorti en 1989. Il a obtenu les récompenses suivantes :

* Oscar du meilleur scénario original en 1990.
* Golden Globes du meilleur film comique ou musical, du meilleur réalisateur, du meilleur scénario, du meilleur acteur dans un film comique ou musical (Billy Crystal) et de la meilleure actrice dans un film comique ou musical (Meg Ryan) en 1990.
* BAFTA Award du meilleur film en 1990.

Une compilation des critiques de la presse («Le Parisien», «Studio», «Le Monde») à propos du film donnerait à peu près cela: avec ce petit bijou d'humour et de tendresse, Rob Reiner réalise une comédie sentimentale drôle où chacun se reconnaîtra. Considérée par certains comme l'une des plus grandes comédies romantiques de tous les temps, elle est interprétée par Billy Crystal et Meg Ryan, un duo d'acteur qui multiplie le plaisir par deux. Portée par une musique exceptionnelle de Harry Connick Jr, voici la «plus passionnante des histoires», celle de l’amitié, de l’amour et du sexe.

Pour ce qui me concerne, j’ai eu l’occasion de regarder ce film à plusieurs reprises. A chaque fois, j’ai apprécié avec un plaisir non dissimulé les dialogues aux petits oignons de cette comédie ancrée dans les années 80 qui n’a rien à envier à celles de ses grands prédécesseurs (au passage, ce mot n'a pas de féminin). Jamais cucul, elle explore avec intelligence quelques travers des relations hommes-femmes et nous en montre le coté intemporel par de petites interviews de couples qui chapitrent le film. Incontournable.